Étude inédite “Les Fintechs et la Bourse”
Calyptus présente les principaux enseignements de la première étude de perception dédiée au secteur des fintechs en Bourse.
5 questions à Mathieu Calleux, Directeur général de Calyptus
Mathieu, qu’est-ce qui vous donné l’idée de réaliser cette enquête sur les Fintechs et la Bourse ? Comment vous y êtes-vous pris ?
Le secteur Fintech nous intéresse chez Calyptus, mais il nous semblait qu’il était peu représenté en Bourse alors que parallèlement, de plus de plus de Fintechs semblent s’intéresser aux IPOs, notamment dans un un contexte de valorisation où la Bourse est plus compétitive qu’avant par rapport au Private Equity.
Nous avons voulu comprendre qu’est-ce qui pouvait freiner / ou favoriser le développement du secteur en Bourse, en interrogeant les investisseurs sur la thématique « Les Fintechs et la Bourse ». Pour mener cette enquête qualitative, nous avons interrogé 15 gérants, spécialistes valeurs moyennes, et analystes, à partir d’une liste de questions ouvertes. Sébastien Ribeiro d’Amiral Gestion nous a aidé à concevoir le questionnaire et Jérôme Hervé d’Euronext a apporté un regard objectif sur le sujet en partageant les données d’Euronext. Un grand merci eux deux et à tous les investisseurs qui ont accepté de contribuer.
1/ La perception qui ressort de cette étude est que le secteur fintech est peu représenté en bourse et méconnu des investisseurs, vous pouvez nous en dire plus ?
Oui. On pourrait s’attendre à ce que, comme ils appartiennent eux-mêmes à l’industrie financière, les gérants connaissent bien le secteur. Ca n’est pas le cas : certains vont même jusqu’à assimiler biotechs et fintechs dans leur perception. Il faut avoir en tête que les gérants valeurs moyennes sont des généralistes : les sociétés cotées ou les candidats à l’IPO doivent donc faire preuve d’une grande pédagogie à leur égard. On trouve en revanche certains analystes spécialisés qui montrent une expertise assez fine du secteur, car il y a quand même en Europe une base de Fintechs cotées, qui, même si elle est limitée, est suffisante pour que des « verticales » Fintech existent chez les brokers.
2/ Est-ce que cette sous-représentation des fintechs est due au fait qu’elles sont plus difficiles à analyser ?
Nous avons demandé au panel s’il y avait des indicateurs spécifiques aux Fintechs pour les analyser. La réponse est unanime : le marché applique en priorité les méthodes d’analyse classiques pour les valoriser et la première d’entre elles est le DCF, c’est-à-dire l’actualisation des cashs flows futurs. Les critères propres au secteur viennent en second lieu : on y trouve en particulier les indicateurs comme l’ARR (Annual Recurring Revenue), le ramp-up, le taux de rétention, qui permettent de mesurer la récurrence des revenus, une caractéristique des Fintechs qui plait beaucoup aux investisseurs. Mais l’attente sur des critères spécifiques porte aussi beaucoup sur l’extra-financier : donner les clés pour apprécier le risque réglementaire, les barrières à l’entrée, le risque de fraude, le risque social et donc la capacité de recruter et fidéliser des profils très recherchés.
3/ Faut-il attendre d’être rentable pour rentrer en bourse ou pas ?
Un des répondants nous a dit « s’il fallait être rentable, je ne ferais plus jamais un seul investissement », donc pas forcément. Mais si la rentabilité en année N ou N-1 n’est pas une condition nécessaire, tous exigent une rentabilité proche, à 3 ans. Et ils veulent avoir sur la rentabilité une vision « très claire et non spéculative ». Ca veut dire notamment permettre aux investisseurs de bien comprendre le modèle et faire la distinction entre la rentabilité de l’ensemble et la rentabilité des opérations : celle-ci doit être positive tout de suite.
4/ Le modèle est donc un choix stratégique, alors faut-il être disruptif ou collaboratif avec les banques ?
Nous avons demandé aux investisseurs s’ils recherchaient plutôt une fintech qui concurrence les banques ou une qui collabore avec elles pour compléter leur offre. Et on constate qu’il n’y a pas de consensus sur cette question. Les moins averses au risque sont favorable à un modèle disruptif, qui recèle plus de valeur selon eux, en particulier au moment de la sortie : s’il n’y a pas de banques partenaires il y aura plus de candidats au rachat. Le modèle de collaboration semble moins risqué et plus réaliste pour d’autres, la taille critique pour espérer concurrencer les banques leur paraissant difficilement atteignable.
5/ En conclusion, la bourse sera t-elle remplacée un jour par une fintech?
Nous nous attendions à avoir des réponses un peu farfelues à cette question, mais elle a été prise très au sérieux. La grande majorité des répondants pensent que régulation et centralisation sont indissociables, et que ce sont les piliers du fonctionnement de la Bourse. La confiance des investisseurs repose sur un marché centralisé. Cela n’empêche pas la Bourse de se digitaliser et de nouveaux acteurs d’émerger, notamment sur les technologies blockchain.